Texte rédigé durant le projet IMAG'IN

Quelquepart, 2023


Mon ami·e,

J’ai conscience que cela fait longtemps que l’on s’est écrit.

Depuis que j’ai déménagé, j’apprends à exister dans une nouvelle ville, près de gens que je ne connais pas. J’ai posé mes cartons, puis je les ai vidé. J’ai regardé par ma fenêtre pour m’imprégner, constater que je l’avais fait : tout quitter, recommencer ailleurs avec d’autres opportunités. Puis la solitude a toqué à la porte, depuis elle traîne derrière moi. Pourtant, je fais tout pour la tromper – je m’invente du courage et je m’aventure dans cette nouvelle vie, ville, je rencontre de nouvelles têtes, je repense à vos sourires. Je m’interroge : qu’est-ce que c’est “faire” communauté ? Quand est-ce que la distance disparaît, quand est-ce que l’amitié et l’amour prennent le dessus ? La première fois que j’ai quitté les miens, ceux que je n’ai pas choisis mais qui m’ont vu grandir, la ville était autant souffrance que délivrance. J’ai ressenti l’amour des autres comme un pansement sur des années d’enfermement, à l’époque je me découvrais entière et complète, nouvelle, avec vous.

Aujourd’hui, loin des miens – ceux que j’ai choisi – j’ai presque perdu le sens du “je” ; et la solitude vient murmurer : “peut-on être aimé sans savoir qui on est ?” J’espère, oui, que l’on peut l’être.

Dans l’attente de te revoir bientôt,


Ton ami·e.